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Le pouvoir du collectif et de l'inteligence collective.  Entretien avec Olivier Pastor

16 septembre 2021
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Le sujet du collectif est souvent source de questions, de réflexions, de nœuds dans le cerveau, même si on peut faire de très belles choses et que c’est souvent dans celui-ci que l'on se transforme le plus et que l'on fait nos plus belles réalisations, le chemin n'est pas toujours facile.

Olivier Pastor, expert en gouvernance partagée, co-fondateur de l'"Université du Nous" nous partage sa vision du collectif et les différents angles dont le sujet peut-être abordé.


Elodie : Bonjour Olivier ! Peux-tu te présente?


Olivier : “Mon métier aujourd’hui consiste à accompagner des organisations qui choisissent de faire évoluer leur mode de fonctionnement en y intégrant davantage de coopération.

J’ai à cœur d’opérer dans des contextes qui contribuent à la transition vers un modèle de société plus juste et plus respectueux des écosystèmes naturels. J’ai ainsi cheminé ces dernières années autour d’organisations pionnières, dans une grande diversité de domaines : les entreprises, le champ de la citoyenneté, de nombreuses ONG, des collectivités, ...  Partout où il est nécessaire de repenser nos structures de pouvoir et nos postures dans son exercice.

J’ai été l’un des co-fondateurs de “l’Université du Nous”, un laboratoire d’expérimentations de nouvelles formes d’organisations, projet qui a produit et mis à disposition des contributions de qualité pour opérer ces mutations organisationnelles et managériales.”

Elodie : Chez Ticket for Change et  Corporate for Change nous sommes convaincus que le collectif permettra le changement. Quelle est pour toi la définition du collectif et pourquoi est-il si important ?


Olivier : "Oui, j’aime à dire que la résolution des problèmes auxquels nous devons faire face, qu’ils soient économiques, sociaux ou environnementaux, passe par le développement de notre capacité à coopérer. L’exemple de la Convention Citoyenne illustre bien le fait que, en sélectionnant un panel de 150 citoyens tirés au sort, on peut, grâce à des mécanismes de coopération, susciter beaucoup d’engagement. Le but de ce dispositif n’était pas de faire émerger des nouvelles réponses puisque celles-ci sont malheureusement connues de longues dates... Il consistait avant tout à légitimer celles-ci.

Pour réussir à mettre en œuvre le changement il va nous falloir apprendre à créer les conditions de son acceptabilité, à ancrer des décisions engageantes dans les collectifs. Et cela va être un enjeu considérable pour notre société.

Ce qui fonde mon rapport au collectif et mon métier d’accompagnant est d’être attaché à créer des conditions de croissance de l’individu, par et au service de la mission du collectif. Cette double articulation est fondamentale pour moi. Si la transformation personnelle appartient à la sphère privée, il me semble nécessaire de pouvoir accueillir dans nos organisations des parties de nous-même qui vont être utiles à la coopération : capacité d’affirmation, de lâcher prise, d’expression des ressentis, à faire du feed back... Il y a là de puissants leviers de coopération ! 

Dans mon parcours professionnel, la découverte de la gouvernance partagée a surtout été l’opportunité de trouver l’équilibre entre la performance collective et l’écologie relationnelle à laquelle j’aspirais."



Elodie : Comment fais-tu concrètement pour créer cette dynamique collective? comment arriver à “faire collectif” dans une organisation ? 

Olivier : La quête de coopération est un but sans fin ! Et beaucoup s’y perdent en chemin.

Nous vivons une période très particulière où tout le monde doit faire preuve de beaucoup de capacité d’adaptation. Arriver face à ces équipes avec un projet de transformation d’entreprises aujourd’hui nécessite beaucoup de finesse pour susciter un élan. Il est probable que malgré vos plus belles intentions, vous généreriez plus de résistance au changement que le changement escompté. Ces derniers mois, j'insiste beaucoup à la mesure, à prendre le temps, à adopter un rythme soutenable.

Le second levier que je me plais à mobiliser est celui du désir.

Avec Martin Serralta, ex-directeur de la transformation de Danone, nous développons des manières très pertinentes pour révéler la raison d’être des organisations à partir de notre élan vital. 

J’emprunte aussi à la méthode très pragmatique employée par Jean-François Caron, Maire de la Ville de Loos en Gohelle pour engager la transformation écologique et sociale de son territoire en s’appuyant sur 1/ la notion d'Étoiles (ces objectifs, par forcément atteignables, qui mettent en mouvement et donnent de l’appétence pour le changement), 2/ des Cailloux Blancs qui symbolisent des réalisations concrètes qui jalonneront notre cheminement.  

Enfin, j’insiste souvent sur notre déficit d’outillage. Par exemple, que vous ayez fait une école de commerce ou d’ingénieur, il est fort peu probable que vous ayez suivi un module de formation sur les méthodologies de prise de décisions collectives. 

De fait, vouloir « horizontaliser » ou « aplatir » son organisation afin de limiter les strates de la hiérarchie se résume souvent à supprimer les dispositifs qui donnent de la clarté dans le « Qui fait quoi », le « Qui décide de quoi ». 

Malheureusement, ce n’est pas en supprimant ce qui organise le pouvoir dans les organisations que l’on supprime la question du pouvoir dans celles-ci. Si vous ne voulez pas créer une organisation chaotique parce que trop floue pour susciter de la confiance, il va être nécessaire de prévoir d’autres architectures qui seront de nature à favoriser l’autonomie, la co-responsabilité. A ce titre, la sociocratie ou l’holacratie sont des dispositifs qui apportent des réponses structurantes.

Elodie : Une question que l’on peut se poser est aussi la question du pourquoi ? Selon toi pourquoi est-il essentiel que les entreprises s’investissent dans le collectif ? C'est-à-dire qu’elles "jouent" collectif entre elles et qu’elles "pensent" collectif à leur échelle organisationnelle.


Olivier : Nous évoluons dans une société où la prédiction de ce que sera demain est devenu un véritable pari. La crise sanitaire n’a fait qu’accélérer ce phénomène ! 

Les modèles d’organisation pyramidaux, centralisés que nous avons hérités de l’ère industrielle reposent pleinement sur cette logique (prédire & contrôler) et peinent donc à répondre aux mutations de la société. Il va bien nous falloir inventer d’autres formes d’organisations pour embrasser ce nouveau stade de complexité. Les silos, avec leur logique d'expertise ne le permettent plus. Mais cela ne veut pas dire que demain il n’y aura plus de place pour les experts dans les organisations. Il s’agit de se dire qu’à défaut de pouvoir disposer de tous les experts dont nous aurions besoin, il est possible d’emprunter un autre chemin pour arriver à un résultat de toute aussi bonne qualité, c’est celui de l’intelligence collective."


Elodie : Pour toutes ces organisations qui sont encore pyramidales et qui voudraient se lancer, as-tu des conseils à leur donner ?


Olivier : “Il n’y a pas une réponse à cette question. Mais puisque que j’étais sur le registre de l’intelligence collective, je ne peux qu’inviter à miser sur les aspirations de leurs collaborateurs pour ces pratiques.

Former une équipe de facilitateurs, de véritables agents de coopération, est un bon moyen de contribuer à la transformation culturelle d’une entreprise.

Cela a le mérite d’apporter au quotidien de la méthodologie pour construire de la confiance et de l’engagement.”

Pour aller plus loin :

Le livre de Thomas d’Ansembourg “Du je au nous”


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